Les associations sectorielles veulent des salaires minimaux différenciés et un partenariat social fort
Les salaires minimaux prévus par les conventions collectives de travail déclarées de force obligatoire doivent avoir la priorité sur les salaires minimaux cantonaux. Avec une adaptation dans la loi fédérale permettant d'étendre le champ d'application de la convention collective de travail (LECCT), ce principe serait à l'avenir ancré dans la loi. Le groupe de base Second œuvre et Enveloppe des édifices de Construction Suisse ainsi que d'autres associations soutiennent expressément cette démarche.

Le point de départ du projet actuellement en discussion est une motion du conseiller aux États Erich Ettlin. Celle-ci demande de protéger le système éprouvé du partenariat social contre les interventions politiques. Concrètement, il s'agit d'inscrire dans la loi fédérale que les salaires minimaux fixés par les CCT déclarées de force obligatoire ont la priorité sur les salaires minimaux cantonaux. Même si les salaires minimaux des CCT sont inférieurs. L'adaptation de la LECCT doit permettre de réduire l'insécurité juridique et de renforcer le rôle des partenaires sociaux. La Commission de l'économie du Conseil national (CER-N) a majoritairement soutenu cette position et recommande d'adopter le projet. La gauche politique, socialistes et syndicats en tête, ne partage pas cet avis et combat le projet.
Maintien du partenariat social
Lors d'un événement parlementaire qui s'est tenu le 12 juin 2025 au Raiffeisen Forum, des représentants de l'économie et de la politique ont discuté des aspects pour et contre. Erich Ettlin (Die Mitte/OW) a présenté la motion et a souligné qu'elle était nécessaire pour préserver le système éprouvé du partenariat social. Cédric Wermuth (PS/AG) s'est opposé à la motion et a souligné le problème que la modification de la loi pourrait entraîner une surtaxation des salaires minimaux cantonaux. Diana Gutjahr (UDC/TG) a en revanche argumenté que ce sont justement les salaires différenciés issus de la CCT étendue qui garantissent des conditions de travail équitables. Du point de vue de l'entrepreneuse, il est clair que "nous ne pouvons pas nous contenter de choisir les meilleurs. Une CCT étendue bien équilibrée est un paquet global". Anita Luginbühl, vice-présidente de l'Association suisse des maîtres menuisiers et des fabricants de meubles (VSSM), et Peter Meier, président du groupe de base Aménagement et enveloppe du bâtiment de Construction Suisse, se sont également ralliés à cette déclaration.
Salaires minimaux : ne pas créer de travailleurs pauvres
La fédération GastroSuisse abonde dans le même sens. Lors d'une conférence de presse précédant l'événement mentionné, le président de GastroSuisse, Beat Imhof, a déclaré que les CCT déclarées de force obligatoire sont des conventions complexes. Les réglementations cantonales créeraient une fragmentation supplémentaire. "Nous voulons des conditions uniformes dans toute la Suisse. Nous ne voulons pas baisser les salaires", explique Imhof. De plus, dans les cantons de Neuchâtel et de Genève, qui ont introduit des salaires minimaux par votation populaire, les taux d'aide sociale n'ont pas baissé. Beat Imhof a également estimé qu'il ne pouvait pas être dans l'intérêt des employeurs de créer des travailleurs pauvres. Dans une interview accordée à "Regard" il a réaffirmé cette position : "Si nous ne parvenons pas, en tant que secteur, à payer des salaires décents, nous n'aurons pas d'avenir sur le marché".
Des salaires différenciés renforcent la formation professionnelle
Les salaires minimaux prévus par les CCT déclarées de force obligatoire offrent depuis toujours au secteur de la construction et à ses travailleurs une protection efficace contre le dumping salarial et garantissent des conditions de travail équitables. Parallèlement, ils permettent de différencier les salaires en fonction des qualifications, du type de profession et de l'expérience. Les salaires minimaux cantonaux, en revanche, sont généralement indifférenciés. De plus, les salaires minimaux fixés dans les CCT déclarées de force obligatoire pour le personnel formé sont généralement nettement supérieurs aux salaires minimaux cantonaux. Donner la priorité aux salaires minimaux cantonaux nivellerait cette systématique différenciée et nuirait donc également à la formation professionnelle. Si la formation devient moins importante sur le plan salarial en raison d'un salaire minimum uniforme, l'incitation à se former et à se perfectionner diminue également. "Pour renforcer les systèmes de formation professionnelle, il est donc important que la formation, la performance et l'expérience professionnelle aient une incidence sur le salaire", explique Diana Gutjahr, conseillère nationale (UDC/TG) et membre de la direction et présidente du conseil d'administration d'Ernst Fischer AG.
Éviter les incertitudes juridiques et de planification pour les PME
Pour les entreprises actives dans le secteur de la construction, mais aussi pour d'autres branches, un paysage salarial fragmenté aurait des conséquences négatives concrètes au quotidien. Il en résulterait une grande insécurité juridique et de planification, notamment pour les mandats extracantonaux et la soumission d'offres. Stephan Saxer, entrepreneur et vice-président de Ceruniq, constate : "Pour les entreprises ayant des commandes dans plusieurs cantons, il devient de plus en plus difficile de calculer des offres conformes au droit et compétitives si des directives salariales différentes s'appliquent partout". Ce sont précisément les petites et moyennes entreprises, généralement actives dans toute la Suisse, qui seraient chargées de manière disproportionnée par une telle évolution.
Négociation au Conseil national
La motion Ettlin sera débattue au Parlement le 17 juin 2025. Alors que les partis bourgeois devraient soutenir la motion, la gauche du Conseil s'y oppose. Son argumentation est avant tout politique, car la réponse du Conseil fédéral à la motion Ettlin était également critique : La demande vise à "réduire la compétence constitutionnelle des cantons d'agir en matière de politique sociale et de fixer des salaires minimaux de politique sociale", peut-on y lire. De plus, une CCT déclarée de force obligatoire ne bénéficierait pas de la même légitimité démocratique qu'une loi cantonale. "Une CCT est un accord entre particuliers et l'extension du champ d'application d'une CCT ne modifie pas son caractère de droit privé", précise le Conseil fédéral. Une CCT de force obligatoire ne se situe pas non plus au niveau d'une loi, mais serait plutôt comparable à une ordonnance. Et d'ajouter : "En réalisant la demande de l'auteur de la motion, le législateur fédéral annulerait la volonté populaire au niveau cantonal, les principes fédéralistes et la répartition constitutionnelle des compétences". Pour les partisans du projet, il ne s'agit toutefois pas de questions de politique étatique, mais du maintien du partenariat social. De nombreuses associations sectorielles voient désormais ce dernier remis en question par les milieux qui se consacrent précisément à la protection des travailleurs.
Source et informations complémentaires : www.ausbaugewerbe.ch